Chapitre 3 - Pas de survie sans sacrifice

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Chapitre 3

«Nulla vita since sacrificio»

Pas de survie sans sacrifice

10 Ans après H-0 «Hour zero» - 3 696 jours dans l’espace.

Le calme était enfin revenu. D’une certaine manière, c’était apaisant : plus de bruits d’alarmes, seulement moi et mon destin. Enfermé dans cette gigantesque boîte de métal, face à une entité inconnue, c’était, en quelque sorte, une journée ordinaire à bord de l’Arch. Cependant, la peur s’insinuait en moi, une terreur froide et inexorable face à l’inconnu. Jamais auparavant nous n’avions rencontré une véritable entité extraterrestre. A l’exception de «hour Zero», ce qui ne fut pas réellement «une rencontre».

L’espace paraît infini lorsque nous naviguons sans connaître notre position, ni même notre destination. Chaque étoile, chaque planète, pourrait abriter des formes de vie insoupçonnées, des intelligences qui nous dépassent. L’idée même de croiser une telle entité me glaçait le sang. Que voulait-elle ? Était-elle bienveillante, ou au contraire, portait-elle en elle la menace d’une extinction immédiate ? Nos instruments étaient impuissants face à cette nouvelle réalité, et l’attente se faisait insupportable.

Nous attendions inlassablement la fin imminente de notre ère, celle de l’humanité. La gravité avait été rétablie pour faciliter l’intervention des unités comme la nôtre, mais le poids de l’incertitude restait omniprésent. Chaque membre de l’équipage ressentait cette tension, cette angoisse diffuse. Le moindre bruit devenait suspect, chaque ombre se chargeait de mystère.

L’idée de rencontrer une intelligence extraterrestre avait toujours été à la fois fascinante et terrifiante. Mais dans ce moment précis, enfermé dans notre vaisseau, elle prenait une dimension bien plus oppressante. L’inconnu, avec tout son potentiel de découvertes et de dangers, se matérialisait enfin devant nous. L’ère de l’humanité semblait fragile face à cette perspective, et chaque seconde s’étirait, lourde de cette crainte viscérale.

Les corridors sombres de l’aile Alpha 2 étaient plus lugubres que jamais. Les pannes électriques, de plus en plus fréquentes, rendaient l’environnement encore plus sinistre. Les lumières clignotaient sporadiquement, projetant des ombres mouvantes sur les murs métalliques, tandis que des étincelles jaillissaient des circuits défectueux. Les conduits de ventilation émettaient des grognements inquiétants, ajoutant une note de tension à cette ambiance déjà oppressante.

D’après le rapport de mission, l’entité était «sur zone» après l’impact d’un fragment de la météorite principale. Je me répétais sans cesse le nom donné par l’IA du commandant : «La Dernière Ombre». À ce moment-là, nous ignorions totalement ce à quoi nous avions affaire. Ce que je savais, c’est que l’aile Alpha 2 abritait le secteur de recyclage de l’Arch, un lieu grouillant de vie avec plus de 10 000 travailleurs, techniciens et «bourrineurs». Ces derniers, au caractère sauvage et brut, travaillaient inlassablement les mains dans le cambouis du matin au soir. Les moteurs du vaisseau étaient leur refuge, et le grondement incessant des machines leur chanson favorite. On retrouvait ces ouvriers acharnés non seulement dans l’aile Alpha 2, mais un peu partout à bord du vaisseau.

C’est l’un d’eux qui avait contacté le commandement pour signaler la présence d’une entité extraterrestre à bord. Malgré tout, l’aile semblait coupée du reste du vaisseau, isolée par les dysfonctionnements électriques et les défaillances des systèmes de communication.

L’Arch, notre gigantesque vaisseau spatial, était à la fois notre sanctuaire et notre prison. Conçu pour traverser les étendues infinies de l’espace, il était un chef-d’œuvre de technologie futuriste. Les parois de métal brillant, les écrans holographiques diffusant des informations en temps réel, et les drones patrouillant les couloirs formaient un contraste saisissant avec les secteurs plus industriels comme Alpha 2. Ici, la technologie de pointe rencontrait la sueur et la détermination humaine, créant un environnement unique où l’Homme et la machine cohabitaient dans une danse complexe et parfois chaotique.

Les problèmes électriques accentuaient cette dualité. Les zones illuminées par la lueur froide des néons semblaient presque utopiques comparées aux recoins obscurs où les ombres régnaient. C’était dans ces ténèbres que l’incertitude et la peur prenaient racine, alimentées par des histoires de vaisseaux perdus et de rencontres fatales avec l’inconnu. L’atmosphère pesante était palpable, chaque grincement, chaque souffle mécanique rappelait à tous les membres de l’équipage la fragilité de leur existence face aux mystères de l’univers.

La présence de l’entité extraterrestre, annoncée par le bourrineur, ajoutait une nouvelle dimension à cette angoisse. L’aile Alpha 2, déjà un lieu de dur labeur et de camaraderie brute, devenait le théâtre d’une rencontre avec l’inimaginable. Chacun retenait son souffle, conscient que cette rencontre pourrait bien sceller le sort de l’humanité.

Nous étions trois équipes de cinq hommes chacune, un nombre modeste mais choisi avec soin. Le commandement préférait envoyer les hommes les plus expérimentés plutôt que des soldats de premier rang. Mon escouade, bien que familière par leurs visages, restait pour moi composée d’inconnus. Nous avancions prudemment à travers les corridors sombres du vaisseau. Le commandant m’avait désigné chef d’escouade.

Nous arrivâmes devant une porte métallique, un sas imposant qui semblait inerte. Aucun signe d’alimentation ne provenait des panneaux de contrôle.

Sheperd : «Lucifer, scanne la porte.» ordonnai-je.

Via ma montre, une LED à peine visible clignota. Lucifer répondit avec son habituel sarcasme.

IA 7.0 Alias Lucifer : «La porte ne semble pas alimentée. Je vous recommande d’utiliser la force, la solution habituelle pour les bipèdes que vous êtes, Capitaine. IA terminé»

Je soupirai, sachant que Lucifer avait raison. Je demandai sans trop d’espoir s’il y avait un technicien parmi nous. Les soldats secouèrent la tête en signe de dénégation. À cet instant, je remarquai la crainte dans leurs yeux; Une peur viscérale et palpable, celle de l’inconnu.

Leurs regards étaient remplis d’une inquiétude à peine contenue. La lumière vacillante des couloirs révélait des traits tendus, des mâchoires serrées, et des pupilles dilatées par l’angoisse. Chacun portait le poids de ses pensées, des scénarios d’horreur silencieusement imaginés. Le silence pesant amplifiait chaque mouvement, chaque respiration lourde. La tension se lisait dans leurs postures rigides et dans la manière dont leurs doigts serraient nerveusement leurs armes.

L’inconnu avait toujours été notre plus grand ennemi. Nous avions traversé des territoires inexplorés, affronté des dangers inimaginables, mais la perspective d’une entité extraterrestre à bord de notre vaisseau ajoutait une dimension terrifiante à notre mission. Les histoires de rencontres fatales avec l’inconnu, de vaisseaux perdus et de civilisations disparues revenaient en mémoire, nourrissant la peur collective.

Je savais qu’il était crucial de garder mon sang-froid pour maintenir le moral de l’équipe. L’incertitude et l’appréhension étaient naturelles, mais il nous fallait rester concentrés. Nous devions affronter cette peur ensemble, trouver une solution pour ouvrir cette porte et continuer notre mission.

«Préparez-vous,» dis-je calmement. «Nous allons forcer cette porte. Restez vigilants et suivez mes instructions.»

Le claquement des armes se préparant à l’action résonna dans le corridor, un bruit rassurant dans cette atmosphère oppressante. Nous étions prêts à affronter l’inconnu, unis par notre détermination et notre expérience. Les regards de mes hommes se firent plus résolus, la peur toujours présente mais dominée par un sens aigu du devoir.

J’étais en tenue civile, équipé seulement de mon arme et d’un sac à dos contenant divers équipements jugés «utiles» par le commandant. Je savais qu’il nous faudrait forcer cette porte, mais une porte de 30 cm d’épaisseur ne s’ouvre pas facilement. Par chance, l’un des soldats portait une armure exosquelette, lui conférant une force surhumaine avec une fatigue minimale.

Sheperd : «Lucifer, si j’arrive à l’entrouvrir, l’exosquelette pourra-t-il ouvrir la porte?»

IA 7.0 Alias Lucifer : «Étude de situation d’intervention 1.0 en cours,» répondit Lucifer avec son ton mécanique et précis.

«1.1 Étude de l’équipement disponible : Aucun équipement de précision pour découper les vérins de fermeture.

1.2 Ouverture via exosquelette impossible, les vérins sont verrouillés et la puissance nécessaire est incompatible avec l’exosquelette.

1.3 Solution alternative : explosif C7.

1.4 Étude de solution alternative : Déconseille d’utiliser.

1.5 Évaluation du niveau de dangerosité : 3/5, risque élevé de fragmentation et d’accident.

Fin de l’analyse.

Selon vos paramètres de personnalité et votre rythme cardiaque en hausse, vous vous préparez à amorcer le C7. Recommandation importante : ne restez pas près de la porte lors de l’explosion. Réinitialisation de l’historique d’étude à 0 pour diminution de la base de données. IA terminé.»

Je sortis délicatement les charges de C7, les fixant avec la plus grande prudence contre la porte. Un soldat posa une main hésitante sur mon épaule.

Soldat : «Vous êtes sûr de vous, Cap’t?»

Je souris à sa question, ressentant à la fois l’incertitude et la détermination en moi.

Sheperd : «Le capitaine en est sûr lui, mais comme je ne suis plus capitaine, je crains de faire une connerie. On va le savoir dans quelques secondes.»

Le soldat déglutit avant de se précipiter, comme le reste de l’équipe, au fond de la pièce. Une fois les charges en place, je les rejoignis et déclenchai la détonation.

La déflagration fut assourdissante, un rugissement métallique qui résonna à travers les corridors. La porte se disloqua en un instant, projetant des fragments d’acier dans toutes les directions. Un nuage de poussière et de fumée emplit l’air, rendant la visibilité quasi nulle. L’onde de choc fit vibrer les parois autour de nous, et une chaleur intense se dégagea de l’explosion.

Nous restâmes accroupis, protégés derrière les débris et les structures du couloir. Les secondes semblèrent s’étirer alors que le bruit de l’explosion s’estompait lentement, laissant place à un silence lourd et oppressant. Je relevai la tête, balayant l’environnement du regard pour m’assurer que tout le monde était indemne.

L’IA Lucifer intervint alors, sa voix calme contrastant avec le chaos ambiant.

IA 7.0 Alias Lucifer : «État de la porte : ouverture réussie. Niveau de dangerosité actuel : 2/5. Recommandation : avancer avec précaution.»

Je me tournai vers mes hommes, tous les visages tendus mais intacts, prêts à avancer malgré la peur palpable.

«En avant,» ordonnai-je. «Restez vigilants, nous ne savons toujours pas ce qui nous attend de l’autre côté.»

Les soldats se relevèrent, l’appréhension visible dans leurs yeux transformée en une détermination farouche. Nous pénétrâmes dans l’obscurité au-delà de la porte, prêts à affronter l’inconnu.

Alors que la fumée de l’explosion envahit l’espace, j’active mon arme. Un faisceau laser perce le brouillard ambiant. Je demande aux autres soldats de faire de même. Chaque pas devient plus lourd, plus réfléchi. Nous sommes dans l’aile Alpha 2. Les lasers révèlent les angles morts et les zones de sécurité, me permettant d’indiquer aux soldats où porter leur attention pour éviter d’être pris à revers.

Pour ajouter à la tension palpable de la situation, notre radio grésille en continu, coupée de tout signal clair. Un sentiment de solitude se fait sentir au sein de l’unité. Sans communication, nous sommes privés de renforts et d’informations sur la situation globale. Les trois équipes déployées pour affronter cette entité sont dispersées, rendant toute aide mutuelle impossible.

Le secteur semble totalement isolé du reste du vaisseau, plongé dans une obscurité totale. Nous équipons tous nos lunettes de vision nocturne. Une fois en place, elles révèlent un corps non loin de là, étendu sur le sol. Je me précipite vers lui, tout en demandant aux hommes de me couvrir. Mon IA commence à scanner le corps.

Sheperd : «Lucifer, analyse complète du corps.» ordonnai-je.

IA 7.0 Alias Lucifer : «Il semble en vie, je reçois un rythme cardiaque faible. Il a été en contact avec une substance inconnue. Je préconise fortement de ne pas le toucher. IA terminé»

J’ouvris mon sac et pris une dose d’adrénaline. Avec précaution, j’enfonçai la pointe dans son torse et appuyai sur le bouton pour administrer la dose. En général, l’adrénaline réveille le sujet avec vigueur. Mais cette fois, rien ne se produisit.

«Il semble mort de l’intérieur.» continua Lucifer. «L’adrénaline n’accélère étonnamment pas son rythme cardiaque. IA terminé.»

Je me redressai, le cœur battant à tout rompre. «Soyez sur vos gardes. Quelque chose de puissant est passé par ici.»

Les soldats se resserrèrent, les yeux scrutant les ténèbres à travers leurs lunettes de vision nocturne. La tension s’intensifiait, chaque souffle se faisait lourd, chaque mouvement précis et mesuré. L’absence de lumière et les communications coupées ajoutaient à notre vulnérabilité, rendant chaque instant plus critique.

«Les gars» dis-je, «on sait maintenant qu’on ne doit pas être en contact avec l’entité.»

Un des soldats se tourna vers moi, l’inquiétude visible dans ses yeux. «Comment ça se propage ?»

Je n’avais pas de réponse à lui donner, seulement des suppositions inquiétantes. «On doit rester ensemble et éviter tout contact direct. La moindre erreur pourrait être fatale.»

Nous avançâmes lentement, les faisceaux de nos lasers traçant des lignes rouges dans l’obscurité. Le grésillement constant de la radio devenait un bruit de fond oppressant, rappelant constamment notre isolement. Chaque ombre, chaque recoin sombre semblait abriter une menace invisible, une présence prête à surgir à tout moment.

Soudain, un mouvement furtif attira mon attention. Une silhouette indistincte se déplaça à travers les débris et les corps calcinés. Je levai une main pour signaler l’arrêt, et tous les soldats se figèrent, leurs regards fixés sur la source de ce mouvement.

«Préparez-vous.» murmurai-je. «Nous ne sommes pas seuls.»

L’adrénaline montait, aiguisant nos sens. Nous étions prêts à affronter l’inconnu, nos esprits concentrés sur une seule chose : survivre et découvrir la vérité derrière cette horreur. Chaque seconde semblait durer une éternité, chaque pas nous rapprochant un peu plus de la confrontation avec l’entité qui hantait l’aile Alpha 2.

Des coups de feu éclatèrent soudainement quelque part autour de nous, et le bruit assourdissant des détonations résonna dans nos oreilles. À mesure que les rafales se rapprochaient, je réalisai que les tirs étaient réguliers et avaient une cadence familière. Il s’agissait des mêmes armes que celles que nous avions à notre disposition. Les détonations étaient celles de nos propres armes, signe que d’autres unités étaient engagées dans un combat intense.

Nous distinguâmes enfin les éclairs des armes à travers le brouillard de fumée. Avant de nous montrer, je criai que nous étions des alliés. Les tirs cessèrent alors, et je me présentai face à cette unité visiblement épuisée. Ils étaient en train de recharger leurs armes encore fumantes. Un homme se précipita vers moi, sans doute le chef d’escouade.

Chef d’escouade : «Vous l’avez vu ?» demanda-t-il d’une voix grave et assurée, peinant à reprendre son souffle.

Sheperd : «Négatif. On aurait dû ?» répondis-je.

Chef d’escouade : «Si vous ne l’avez pas croisé, c’est que cette saloperie passe à travers les murs. Elle semble se diriger vers la salle des machines.»

Sheperd : «Les armes ont un effet sur elle?»

Chef d’escouade : «Je ne sais pas. Elle a fui. Elle est très rapide. J’ai deux hommes à terre par contre.»

Il se retourna et se dirigea vers les deux corps inertes. Je m’accroupis pour les examiner. Les mêmes marques noires étaient présentes.

Chef d’escouade : «Il y a eu des projectiles dirigés vers nous. Rapides et presque invisibles. Une sorte de brume, comme l’entité.» expliqua le chef d’escouade.

Un de mes soldats m’appela, insistant pour que je voie quelque chose. Je le suivis et aperçus le long du mur une marque noire. Là où se trouvait cette marque, le système électrique était endommagé et hors service. Malgré la faible intensité du courant, je compris que cette entité brûlait tout ce qu’elle touchait. Au-delà des pertes humaines, il était évident qu’elle pouvait causer des dégâts catastrophiques au vaisseau.

Sheperd : «Cette chose... elle ne se contente pas de tuer.» dis-je en me redressant. «Elle pourrait détruire le vaisseau tout entier.»

Le silence qui suivit mes paroles était lourd de tension. Les visages de mes hommes reflétaient une peur contenue, et toujours cette détermination farouche. Nous savions que chaque seconde comptait.

Sheperd : «Votre grade?» demandai-je au chef d’escouade.

Le chef d’escouade se releva avec difficulté. C’était un homme d’une soixantaine d’années, son visage buriné par des décennies de combat. Assez corpulent, sa stature imposante témoignait d’une force encore intacte malgré les années. Sa barbe grise et touffue encadrait un visage marqué par des rides profondes, chaque ligne racontant une histoire de batailles passées et de sacrifices consentis. Ses yeux, d’un bleu perçant, étaient remplis de l’expérience et de la sagesse d’un vieux vétéran. Ils avaient vu l’horreur de nombreuses guerres, mais jamais rien de tel. Ses mains robustes, aux doigts épais et couverts de cicatrices, trahissaient son passé de mécanicien et de combattant aguerri. Malgré la fatigue évidente qui pesait sur ses épaules, il dégageait une aura d’autorité indéniable et de détermination farouche

Chef d’escouade : «Sergent chef.» répondit-il, sa voix révélant une fatigue immense mais une volonté de fer. «J’ai vu bien des choses, mais jamais rien de tel.»

Chef d’escouade : «J’étais Sergent-chef dans l’armée de terre patriotique. Mitchel Connor à vos ordres, Cap’t.»

Sheperd écouta attentivement les paroles de Mitchel, conscient que son expérience était précieuse dans cette situation critique. Il ordonna à ce qu’il reste de ses hommes de transmettre au commandement la gravité de la situation, tout en décidant de poursuivre avec Mitchel vers la salle de recyclage.

Mitchel Connor : «Je suis un bourrinneur maintenant à bord de l’Arch, je suis au service technique du centre des eaux usées. Mais j’ai bossé au service de recyclage pendant 2 ans avant ma mutation. Je connais les lieux. On a plus de chance de la trouver dans la salle de recyclage. L’espace sera gigantesque, on aura de quoi les voir venir.»

Nous avancions prudemment à travers les corridors, découvrant de plus en plus de marques noires sur les corps des hommes et les parois. L’entité semblait se déplacer de manière chaotique et imprévisible.

Après plusieurs minutes de marche, nous atteignirent enfin la salle de recyclage. Cette salle futuriste, habituellement en pleine activité, était maintenant à l’arrêt. Les machines complexes et les structures métalliques imposantes témoignaient de la sophistication technologique de l’Arch.

Moi et mon équipe progressions avec prudence sur l’une des nombreuses passerelles surplombant la salle. Nos viseurs balayaient chaque recoin, prêts à réagir au moindre signe de danger. Soudain, je leve le poing en l’air pour ordonner à son unité de s’arrêter net. Nous observions avec angoisse des ombres humanoïdes planant silencieusement en haut de la salle.

Mitchel s’approcha discrètement de moi et me murmura : «Cap’t, avec nos armes, on n’a aucune chance.»

Sheperd : «Alors pourquoi sommes-nous ici?»

Mitchel répondit calmement : «Pour collecter des informations comme on nous l’a appris dans l’armée.»

Le bip de la montre de Sheperd interrompit leur discussion.

IA 7.0 alias Lucifer : «Négatif, selon les analyses en cours, il ne faut en aucun cas que ces entités pénètrent dans d’autres secteurs du vaisseau sinon ils seront perdus également. L’entité semble se nourrir en énergie, tant que le générateur fournit de la puissance, nous pouvons les contenir. Après, ce sera aux autres secteurs. IA terminé.»

Je pris une profonde inspiration, conscient des mots que j’avais entendus plus tôt dans la journée de la part du commandant de bord : «Nulla Vita sine Sacrificio» — «Pas de vie sans sacrifice».

Mitchel me regarda avec un sourire compréhensif et murmura : «Le credo des Hammers…»

Cette mission était maintenant non seulement une question de survie immédiate, mais aussi un test de détermination et de leadership face à l’adversité extrême à bord de l’Arch.

En interrogeant mes hommes pour obtenir des informations cruciales, je commence à exposer le plan que je conçois pour nous débarrasser de ces entités. Leurs visages me jugent, ceux que j’ai cherché à éviter depuis l’incident initial. Ces regards redoutés du commandant, que je dois paraître ignorer. Je mesure la gravité de la situation et prends des décisions en conséquence, une capacité que beaucoup ne possèdent pas. J’ai toujours su mettre de côté mes émotions. J’entends leurs réticences face aux conséquences de mon plan, mais je les ignore. Les grandes leçons de l’histoire nous montrent que l’inaction a souvent conduit à des catastrophes. C’est une leçon que j’ai apprise chez les Hammers, forgée dans la pierre en tant qu’ancien Capitaine. Je n’ai aucun remords à faire ce qui doit être fait.

Les deux équipes se séparent, suivant des directions distinctes selon le plan établi. Je fais partie de celle qui se dirige vers le cœur du centre de recyclage, la salle des machines. Mitchel se colle à mon épaule, accompagné d’une jeune recrue qui nous suit de près. D’un geste silencieux de la main, je leur indique de faire preuve de discrétion. Dans l’obscurité environnante, nos lampes torches sont notre unique source de lumière, éclairant faiblement les rares lumières clignotantes d’alarme rouge.

Mitchel chuchote : «Code rouge derrière cette porte, mettez vos masques à oxygène.»

Je prends les masques à oxygène des sacs et les distribue à tout le monde. Agrippant la porte, j’active la manivelle pour désactiver les vérins, mais malgré leur déverrouillage, elle résiste à notre ouverture. Je demande à la jeune recrue de m’aider, et ensemble, nous parvenons à l’entrouvrir de quelques centimètres. La faible quantité d’oxygène dans la nouvelle zone aspire l’air de la pièce principale, produisant un léger sifflement inquiétant. Mes craintes se confirment lorsque Mitchel nous presse de nous dépêcher, signalant que les entités nous ont repérés.

Mitchel ouvre le feu, illuminant l’obscurité avec des flashs de tirs de plus en plus fréquents. Les balles semblent traverser les entités qui se dissolvent dans l’air avant de reprendre leur forme. Nos armes ne les tuent pas, mais les ralentissent apparemment. Je demande au jeune recrue de prendre le C7 dans mon sac pour faire exploser la porte. Il s’exécute, me les tendant rapidement. Alors que je fixe la porte, une brume la traverse et je me retrouve face à une de ces entités.

De près, elle a l’apparence de la mort, avec un crâne noir déformé ressemblant à celui d’un humain mais avec une mâchoire squelettique acérée. Je me jette au sol en vidant un chargeur en direction de l’entité qui disparaît en passant à travers la porte. En me relevant, je vois une trentaine d’ombres nous encercler de manière menaçante. Mitchel les repousse alors qu’elles se rapprochent à quelques mètres de nous, se précipitant comme des bêtes enragées. À ce moment, la peur s’empare de moi, le moment où un soldat doit faire la différence. Alors que je tire de nouveaux tirs pour disperser les ombres autour de moi, je prépare avec hâte les charges contre la porte.

La pression sur mon unité s’intensifie. Je vois le jeune homme se faire traverser par une ombre, sa peau noircissant avant de s’effondrer, ses jambes ne le soutenant plus. Mitchel me crie de déclencher la bombe. Je me précipite vers lui et l’active juste à quelques mètres de distance, sentant la chaleur de l’explosion frôler nos nuques. Sur une passerelle, déséquilibrée, je lutte pour me relever en aidant Mitchel. Les ombres semblent se disperser mais restent présentes. En les pourchassant, nous les repoussions, tournant en cercle pour les éloigner. À chaque instant où l’un de nous tire, l’autre recharge son arme. Chaque mètre gagné était une victoire, chaque pas nous rapprochait du succès de notre mission. Nous ne prenions même pas le temps de remarquer que les murs étaient devenus noirs et que l’oxygène se raréfiait dans ce secteur.

Sheperd : «Dernière charge pour moi, Mitchel» dis-je tout en tirant.

Dans cette scène intense, Mitchel me lance un chargeur supplémentaire, signe de sa détermination et de sa préparation à affronter les entités qui les assaillaient. Alors que je prends un moment pour observer les corps inertes autour de nous, une sensation de lourde responsabilité m’envahit. Le bloc abritant plus de 10 000 personnes, désormais silencieux et sombre, me rappelle la gravité de la situation.

Sheperd : «Activez la surcharge du générateur!» Je hurle à Mitchel, qui se précipite vers les commandes de la salle tandis que je couvre nos arrières du mieux que je peux. Le générateur émet un bourdonnement assourdissant alors que les entités se ruent vers lui, momentanément distraites de notre présence. Le sol commence à se noircir, et je me précipite pour éviter ce qui semble émerger du sol. Une ombre massive se profile soudainement, plus menaçante que les autres. J’épuise le chargeur de mon arme principale sur elle, et dans un geste rapide, je passe à mon arme de poing. Les projectiles d’ombre fusent de toutes parts, et je les esquive de justesse, tout comme Mitchel.

Repartant du mur où je m’étais adossé pour reprendre mon souffle, je pose mon sac à terre. Mitchel m’ordonne de courir vers la sortie et nous sprintons ensemble vers le couloir que nous avons emprunté à l’aller. Il n’y a plus de place pour les tirs précis, seulement la nécessité urgente de fuir. Les ombres nous entourent fugacement, ravivant la terreur qui me submerge. Mitchel, robuste malgré son âge, boite soudain en criant qu’il a été touché à la jambe.

«Prenez le lance-grenades de mon sac, Capitaine!» Il me presse avec une urgence palpable.

Je saisis l’arme et tire rapidement sur nos assaillants.

Mitchel : «Je ne sens plus ma jambe, vous devez m’aider, hors de question de crever ici !»

L’explosion de la grenade fit disparaitre un cours instant les entités qui nous pourchasse. Me laissant un peu de temps pour aider Mitchel.

Je m’accroche à lui avec difficulté, l’aidant à avancer malgré sa jambe blessée. À la passerelle, les entités semblent devenir encore plus erratiques, rendues folles par la surcharge du générateur. J’active à nouveau le détonateur dans ma main. Une explosion retentit au loin, provenant de la salle des machines. Le souffle nous projette en arrière, fissurant la passerelle qui commence à basculer dans le vide. Je m’agrippe rapidement à une grille pour éviter de tomber. Mitchell se trouve sur la partie stable de la passerelle, tendant la main vers moi. À bout de force, je rassemble mes dernières réserves pour me hisser vers lui. Mon corps tout entier est tendu dans l’effort, et j’arrive enfin à attraper sa main. Bien que fatigué, Mitchel continue de se battre, son esprit déterminé malgré la douleur.Il arrive à me hisser tant bien que mal.

Mes pensées s’embrouillent alors qu’un projectile d’ombre me frappe au bras, me laissant une sensation de froid et de poids anormal. Mon bras devient immobile, ma main figée dans une couleur sombre et inquiétante. Il n’y a pas de douleur, seulement une conscience alarmante de la perte de contrôle sur une partie de moi-même. L’impact me force à lâcher Mitchel, mais je change de position pour l’aider avec mon autre bras. La situation devient de plus en plus critique alors que nous nous efforçons de quitter cette zone infestée d’entités hostiles.

Chaque pas devient un défi, chaque mouvement une lutte contre l’épuisement croissant et les effets étranges de l’attaque d’ombre. Malgré tout, nous avançons, portés par la détermination commune de ne pas succomber ici. Mitchel et moi, chacun à notre manière, résistions à la terreur et à l’obscurité qui menacaient de nous engloutir.

«Nous y sommes presque», je lui murmurai, la voix tendue par l’urgence de la situation. Les détonations résonnaient encore autour de nous, les balles offrant une couverture précaire pendant que nous nous frayions un chemin. À l’entrée du sas de secteur, la seconde unité nous attendait, prête à ouvrir le feu. Les éclairs de leurs tirs indiquaient clairement notre voie de retraite. Un des hommes vint à mon aide pour soutenir Mitchel. Ensemble, nous nous efforcions de contenir la marée d’ombres qui nous poursuivait. Nous franchîmes le sas juste à temps, chaque homme passant à travers avant que la porte ne se referme derrière nous. Une explosion retentit de l’autre côté du sas, soulignant la violence de la bataille que nous venions de quitter.

Un soldat me tendit une radio.

Sheperd : «Ici le Capitaine Rafaël Sheperd au Commandant Emri, code «A-1» de l’aile Alpha 2!»

La radio grésilla un instant avant de répondre.

Commandant Emri : «Ici Emri, confirmé code «A-1».» La voie était très calme à la différence de l’ambiance ici-bas.

Sheperd : «Code confirmé ! Vite, risque de propagation de l’entité confirmé.»

«Nulla Vita since Sacrifico»

La station tremblait violemment, les alarmes stridentes retentissant dans tous les couloirs. Je me frayais un chemin avec difficulté vers l’un des rares hublots du vaisseau encore intact. À travers la vitre, j’observais l’aile du vaisseau se détacher lentement de l’Arch. Seul face à cette décision, j’avais condamné plus de 10 000 personnes à l’exil, à une mort probable si elle n’était pas déjà survenue. Le regard vide, j’assistais aux ombres s’échappant de l’aile détachée de l’Arch, se dispersant dans l’immensité de l’espace.

La culpabilité pesait lourdement sur mes épaules, bien que je m’efforçais de la dissimuler derrière un masque impassible. En tant que leader, j’avais dû prendre une décision difficile pour sauver ce qui pouvait encore l’être. C’était mon devoir en tant que Hammer, un devoir que j’avais accepté avec fermeté dès le début de ma carrière militaire.

Pourtant, malgré la force de notre crédo - «Nulla Vita Sine Sacrificio» - qui signifiait «pas de vie sans sacrifice», cette décision m’avait laissé un goût amer dans la bouche. Je ne pouvais m’empêcher de ressentir une profonde tristesse pour les milliers de vies désormais condamnées à errer dans l’espace. Chacun de ces visages anonymes, chacune de ces existences perdues, pesait sur ma conscience.

Dans mes yeux, derrière ma posture de commandement stoïque, se cachait la tourmente intérieure. Je me demandais si j’aurais pu agir différemment, trouver une solution qui aurait préservé ces vies. Mais au fond de moi, je savais que les circonstances avaient exigé une décision rapide et sans compromis. C’était ce que signifiait être un Hammer : prendre les décisions les plus difficiles, même lorsque cela signifiait sacrifier des milliers pour en sauver potentiellement des millions.

Mon engagement envers mon devoir et envers mes camarades était inébranlable, même dans les moments les plus sombres. C’était cela, la vraie essence de servir sous la bannière des Hammers : l’acceptation du fardeau des responsabilités et le courage de faire face aux conséquences de nos actes. Le commandant comprenait l’importance de notre crédo, une valeur que je défendais en cet instant crucial. Pourtant, c’était aussi un drame, un événement tragique rappelant celui de «l’hour zero». Alors que les équipes médicales arrivaient autour de nous pour nous secourir, mes pensées étaient ailleurs. Seul avec mes choix, je me perdais dans les profondeurs de mes réflexions.

«Résidents de l’Arch, après un nouveau décompte, nous déplorons la mort de 10,431 résidents de l’Arch suite à l’activation du code « A-1 » par le commandant. L’entité extraterrestre a été supprimée. Le total des survivants est de 970,362 après la mise à jour de ce décompte.»

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J’ai passé deux semaines alité, récupérant peu à peu l’usage de mon bras. Mitchel aussi a retrouvé l’usage de sa jambe. Nous portons encore les marques sombres, témoins indélébiles de notre combat. Pour moi, c’est un rappel constant de mes péchés, de ce que j’ai dû faire. Les systèmes de l’Arch ont été réparés, la gravité restaurée dans tout le vaisseau, les lumières clignotent à nouveau, ramenées à leur état d’avant la tempête. Celle-ci semble désormais loin derrière nous.

Je m’apprêtais à reprendre mon travail de livreur pour subvenir à mes besoins, quand j’ai été convoqué à l’église de la «zone». Deux hommes m’ont escorté, me laissant peu de choix dans la décision de les suivre. Normalement, je ne me laisse pas facilement diriger, mais je me sentais encore épuisé par nos récentes aventures.

La «zone» semblait fonctionner normalement, vibrant d’activité. Les sex-shops étaient remplis, les gens cherchant désespérément à échapper à la réalité. L’église, au cœur de cette débauche, symbolisait le déclin de l’humanité. Comment croire en Dieu après tout ce que nous avions traversé? C’était juste un bâtiment parmi tant d’autres, dépourvu de sens profond.

Elle semblait déplacée, presque perdue. Jadis, elle aurait été un sanctuaire de foi, un refuge spirituel pour les âmes en quête de réconfort et de sens. Mais maintenant, elle était entourée de lieux qui ne laissaient guère de place à la spiritualité : des boutiques de plaisir et d’évasion, des endroits où l’humain cherchait à satisfaire ses désirs les plus immédiats.

Silencieuse et déserte au milieu de ce vacarme urbain, ses cloches qui autrefois appelaient à la prière étaient désormais éclipsées par le vacarme des rues, par les cris des passants et le bourdonnement constant des néons publicitaires.

Les rares âmes qui franchissaient ses portes semblaient en quête de quelque chose de plus, cherchant peut-être une lueur d’espoir dans un monde qui semblait avoir perdu le sien. Les bancs étaient souvent vides, les cierges brûlaient timidement, témoignant d’une foi vacillante. Les prêtres eux-mêmes semblaient lutter pour trouver les mots qui pouvaient encore toucher les cœurs endurcis par les épreuves et les désillusions.

L’église, jadis un pilier de la communauté, semblait maintenant être en marge, déconnectée des réalités contemporaines. Elle n’avait plus l’attrait ni l’influence qu’elle avait autrefois sur les âmes en quête de sens. Elle était devenue un vestige du passé, un rappel des croyances perdues et des espoirs déçus, un monument solitaire dans un monde qui se cherchait de nouvelles idoles à adorer.

Avec mon escorte, j’entre dans l’église, un bâtiment qui, malgré son apparence futuriste, garde une atmosphère de mystère et de solitude. Les murs, autrefois ornés de fresques et de statues, sont désormais tapissés de panneaux d’acier gris métallisé et de néons bleus intermittents qui dessinent des motifs abstraits sur le plafond voûté. La lumière, tamisée et froide, semble filtrer à travers des vitraux numériques, projetant des jeux de couleurs distordus sur le sol en marbre noir.

À l’intérieur, l’église ne ressemble plus à un lieu de culte traditionnel, mais plutôt à une relique d’un passé spirituel oublié, transformée en un sanctuaire technologique où la foi et la technologie se mêlent de façon étrange. Les bancs, au design minimaliste, sont faits de métal poli et de cuir synthétique, s’alignant en rangées parfaites sous des lustres de néon suspendus, qui rappellent des constellations artificielles.

Au fond de l’église, une grande croix holographique, pulsant lentement de lumière bleue, domine l’autel désaffecté. Des hologrammes de prières et de versets bibliques défilent en boucle autour de la croix, se mêlant aux bruits étranges de l’église : le bourdonnement discret des circuits, le cliquetis des panneaux solaires sur le toit, et le murmure des flux d’informations qui circulent en arrière-plan.

Au premier rang, un homme est assis seul. Son visage m’était familier, bien que je n’aie jamais pris le temps de le connaître. C’était l’un des politiciens que j’avais aperçus lors de nos débriefings de situation. Son visage, marqué par les années et les compromis, est caché derrière des lunettes carrées, typiques de l’homme politique moderne, toujours prêt à peser chaque mot, à choisir ses mots avec une précision calculée, sans jamais vraiment les penser. Il porte un costume sombre, peut-être un peu trop serré pour sa silhouette, accentuant son air rigide et distant.

On m’ordonne de m’asseoir près de lui, avec une force qui ne laisse place à aucune rébellion. Je leur lance un regard froid, leur intimant de se calmer, leur faisant comprendre que je ne suis pas là pour être mené comme un mouton. «Calmez-vous, je peux aussi mordre,» leur dis-je, ma voix trahissant à peine la tension et la détermination qui bouillonnent en moi. Le silence qui suit est lourd, presque palpable, et l’homme au premier rang se tourne vers moi, un sourire pincé aux lèvres, comme s’il se demandait si j’allais être le soldat docile ou le rebelle imprévisible.

Politicien : «Je suis Velasco, dirigeant du parti politique Huma. Rassurez-vous, la religion n’est plus un sujet depuis longtemps. Malheureusement ou heureusement, personne ne pourrait le dire avec certitude. Néanmoins, elle fait partie de notre histoire. Était-elle la plus grande garante de paix ou de conflits, à votre avis?»

Sheperd : «Vous avez dû vous renseigner sur moi, je ne suis pas croyant et je trouve tout cela assez futile», répondis-je avec retenue.

Velasco : «Répondez à la question, je vous prie.»

Non sans soupir, je finis par lui répondre.

Sheperd : «Elle a été la cause de nombreuses guerres à travers les siècles, donc je la considère plus néfaste qu’autre chose dans l’histoire humaine.»

Velasco : «C’est ça, Capitaine. Cette vision pragmatique, dénuée de sentiments, est caractéristique des Hammers. C’est aussi la raison de votre présence ici.»

Sheperd : «Je dois avouer que je suis curieux de connaître votre point de vue.»

Velasco : «À travers le temps, les religions ont apporté une croyance essentielle aux différents peuples. Vous pensez qu’elles ont été les instigatrices de guerres, mais moi, je crois que sans croyance, il n’y aurait pas de survie. Sans les religions, le monde n’existerait peut-être plus depuis longtemps. Il faut donner aux gens une raison de croire en quelque chose pour survivre. La survie est notre préoccupation quotidienne.»

Sheperd : «J’ai l’impression que vous cherchez un prêtre, pas un homme pragmatique comme moi.»

Le politicien sourit en retour.

Velasco : «Les temps changent. Là où la religion suffisait autrefois, nous devons maintenant puiser l’espoir dans de nouveaux récipients.»

Sheperd : «Moi? Vous vous êtes trompé de personne pour cela.

Il rit franchement.

Velasco : «Non, pas vous. Je vois plus loin. Inutile de jouer la langue de bois avec vous. Vous avez vécu trop de choses pour être manipulé par quelqu’un comme moi. Vous êtes, Capitaine, ce que j’appelle un outil.

Sheperd : «Je suis flatté par cette appellation, mais cela ne fera pas de moi un outil à votre disposition. Le temps passe, et même vos deux hommes de main ne pourront pas m’arrêter lorsque je déciderai de partir.»

Velasco : «Vous contraindre, non. Mais vous convaincre, oui. Sheperd, tout le monde a un prix, même vous. Derrière votre façade solide se cache une faiblesse, comme tout le monde.»

Sheperd : «Un Hammer...» Je fus interrompu.

Velasco : «... n’a pas de faiblesse. Arrêtons les contes de fées. La participation à mon projet vous fera sauver la vie que vous protégé depuis maintenant plus de 10 ans.»

Je me retourne vers lui, il me fait un signe de la tête affirmatif. Ainsi je comprends à ce moment là qu’il sait. Alors que mon visage se noirci et mes poings se ferment. Il met la main en avant afin de me tempérer.

Velasco : «Si vous refusez, rien ne vous arrivera, ni à vous ni à votre protégée. Cependant, sachez que j’ai le pouvoir de la sauver. Si c’est votre prix, je peux le payer. C’est une promesse que vous fait. Ne me considérez pas comme un ennemi, Sheperd. Voyez-moi plutôt comme un outil, si vous ne pouvez pas me voir comme un ami.»

Mes poings se relâchent, ma mâchoire se détend.

Sheperd : «Je vous ferai tenir cette promesse. Parlez-moi de ce projet, Velasco.»

Velasco : «L’espoir, Capitaine. Mon projet, c’est l’espoir, et vous en êtes le cœur.»

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Dans ma cabine, je fixe un moment le caisson d’hibernation face à moi. Repensant à notre conversation avec Velasco. Pour la première fois, une lumière d’espoir s’ouvre à moi.

Sheperd : Jour «3 709» après « Hour zero ». Journal de bord du Capitaine Rafaël Sheperd : «Je suis en vie et je compte le rester»

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